- Finlande / Janvier 2014 / 8 titres / 45:27
- Label : Doomentia Records
- Genre : doom/sludge metal
- Format : vinyle standard LP gatefold
- Autres formats disponibles : CD digipack, téléchargement (sites habituels)
Ce groupe est sous-estimé. Peut-être que le fan de death le trouve trop lent. Le fan de sludge trop linéaire. Le fan de doom trop crade et sauvage. Le fan de post trop metal. Pour tous les autres : trop extrême. La musique des finlandais a cela d’étonnant qu’elle semble familière et pourtant si singulière. Bestiale, elle est cependant difficile à décrire, telle la Bête du Gévaudan engendrant maints récits et mille interprétations.
En 2012 Lurk apparaissait pour la première fois sur les plaines de l’Empire metal avec un album tonitruant. On attendait donc ce deuxième méfait avec impatience, espérant que la révélation ferait place à la confirmation. Attentes comblées : plus long que son prédécesseur, Kaldera se révèle plus riche et plus puissant (malgré un son maison). Jamais clair, le chant caverneux parvient à briser toute monotonie : à l’aise sur les terres primitives du death metal old school à la suédoise, Kimmo Koskinen varie beaucoup ses hurlements (parfois torturés) et maîtrise à la perfection ce qu’on pourrait appeler du « grogné-chanté » (« Rest Unitaries »). Une performance rare.
Un volcan s’éveille, l’humanité s’éteint (mais pas la Bête)
Ce chant bestial accompagne les riffs doom metal traditionnels, véritable colonne vertébrale de l’animal. On est donc assez loin des canons du sludge, d’autant plus que les contrastes rythmiques sont aux abonnés absents. Et pourtant l’atmosphère sombre, le pessimisme ambiant, les guitares lourdes et grasses, ou encore la discrétion de la grosse caisse (rien à voir avec les standards metal actuels) sont susceptibles de caresser la barbe du sludger dans le sens du poil. Nous, on est conquis par cette sauvagerie et cette puissance de l’instinct.
Kaldera, une éruption volcanique sans scories, rongeant la mécanique rodée d’un metal trop souvent propre et codifié. Dans ce magma sonore les refrains sont difficilement identifiables. Au début, tu auras du mal à t’y retrouver. Mais hormis la fin en queue de poisson de « 6 Feet, 6 Years », tout s’articule naturellement autour des riffs. Arpèges inquiétants ou guitares aériennes (« Ritual ») tissent une ambiance étrange (« Lorn » et son break de basse), à tel point qu’on verrait bien ces gars-là fricoter dans l’espace avec leurs compatriotes et camarades de l’extrême d’Oranssi Pazuzu.
On les entend plus franchement flirter avec le post-atmosphérique école Neurosis, ou encore le black metal, à l’occasion d’un final haletant. Manière peut-être de dédier l’œuvre – sulfureuse plutôt que lugubre – à « l’échec de l’humanité ». Lurk a l’audace d’orner trois de ses compositions d’instruments classiques (clarinette basse, violon, violoncelle), façonnant sa créature pour finalement l’auréoler d’une cérébralité à la fois surprenante et effrayante. Sacrée bestiole.
___8/10___
Artwork et textes : Sur cette pochette rebutante, une photo de fœtus qui illustre, selon le groupe lui-même, un échec total et absolu dans la vie. Ambiance. Les textes apocalyptiques figurent sur un encart (sur le gatefold lui-même ç’aurait été mieux). Si tu veux t’y pencher, accroche-toi.
Jolie kro ! J’avais adoré leur premier méfait, je n’ai plus d’excuse pour sombrer dans celui-ci.
Aucune excuse en effet! Il faut prendre son temps pour plonger dans le cratère… Merci pour le com’ 😉